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contribution 08 - CRUVELLIER Thierry

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Transferts

Thierry CRUVELLIER

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Premièrement, une toute petite réaction à ce qu’a dit Madame Del Ponte, parce que j’ai peur que vous ne nous fassiez faire un recul sur ce sur quoi vous nous aviez aidés à avancer hier, c’est-à-dire le politique. Il me semble que vous nous proposez le rêve d’une justice sans politique, donc pratiquement d’un monde sans politique. Je m’interroge beaucoup parce que je crois que c’est non seulement un rêve, mais c’est sûrement un rêve dangereux. Vous avez souligné le problème du juge législateur. Une des difficultés qu’on a eue avec ces tribunaux, pour des raisons diverses facilement compréhensibles, ils ont fini par fonctionner dans un régime qui n’est plus animé par la séparation élective des pouvoirs et que ça a été source d’abus.

Je crois qu’une justice qui serait laissée à elle-même, sans contrôle du politique, serait aussi la source d’abus évidents dans l’avenir. Donc, à mon avis, ce n’est pas une réflexion qui permettra de respecter ce qui a constitué, jusqu’ici en tout cas, notre meilleure compréhension d’un régime démocratique avec différents pouvoirs qui s’équilibrent et qui sont séparés. N’éliminons donc pas le politique. Encore une fois, je croyais que c’était le grand progrès que nous avions fait hier.

Une autre petite réflexion sur un certain nombre de débats qui ont lieu depuis le début et que je souhaiterais aborder de nouveau. Cela fait quinze ans que la justice se déroule sur le génocide rwandais, il a été souligné que jamais un crime de masse de cette nature n’a fait l’objet d’une telle action judiciaire. C’est colossal quand on cumule les Gacaca, le travail au Rwanda, le travail au TPIR et les juridictions nationales. Et il semble qu’on n’en finit jamais.

Mais je m’interroge alors sur une justice sans fin. Est-ce que c’est une bonne idée ? Cet héritage des tribunaux contemporains selon laquelle la justice n’en finit jamais m’interroge sur d’autres intérêts que ceux des hommes de loi ou de droit quand on traite de la façon dont on gère l’après de ces crimes de masse. Beaucoup de pays jusqu’ici, à mes yeux, ont décidé qu’à un moment donné, il fallait en finir. Je pose donc cette question : est-ce qu’il ne faut pas savoir aussi envisager la fin d’une action judiciaire ?

Sur la question des transferts. Elle s’adresse évidemment au Procureur : est-ce que vous avez l’intention de redemander des transferts de procès vers le Rwanda ? Et si oui, dans la mesure où jusqu’ici la Chambre d’appel vous l’a refusé de manière répétée, qu’est-ce qui a changé, qu’est-ce qui serait nouveau ?

Andrew CLAPHAM

L’autre question que j’ai notée et qui mériterait une réponse de la part du banc de la défense et celle de l’auto-représentation devant le Tribunal. Mme l’Ambassadrice Del Ponte a un avis marqué sur ce point, mais j’aimerais entendre une réponse de la Défense sur cette question. Mr Lurquin s’était signalé ?