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contribution 01 - CHETAIL Vincent

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(Début de la session : 13h45) // (Beginnng : 1.45pm)

Vincent CHETAIL

version originale

Je vous remercie d’être venu pour cette session de clôture.
Je vais peut-être commencer par me présenter : je suis Vincent Chetail, je suis directeur de la recherche à l’Académie de droit humanitaire et des droits humains et professeur à l’Institut de hautes études internationales et du développement. J’ai eu la chance de participer à l’organisation de ce colloque avec André Guichaoua qui a été l’initiateur de cette belle idée. Mon rôle a donc surtout consisté à être un facilitateur, même si évidemment il s’agit d’assumer aussi la part de responsabilités que cela peut impliquer. Je dois dire, à titre purement personnel, que c’était un vrai plaisir de travailler avec André Guichaoua ; je n’aurais peut-être pas l’occasion de le dire, donc je préfère le dire dès maintenant. Ce fut une expérience très enrichissante surtout pour les juristes et particulièrement les juristes qui travaillent dans le domaine du droit pénal international.

L’énergie que tout le monde a déployée dans le cadre de ce colloque en valait la peine, les débats étaient vraiment intéressants. Evidemment, nous n’avons pas pu tout couvrir, il y a de nombreuses questions qui restent sans réponse. Nous avons encore quelques heures pour essayer d’y remédier, mais il faut aussi ajouter qu’il n’était pas possible d’aboutir à une exhaustivité totale dans le temps qui était imparti. J’ajouterais qu’une approche plus exhaustive, voire systématique, du bilan du Tribunal sera l’objet de la publication à venir. Cette publication nous donnera l’occasion de compléter et développer des points que nous n’avons pas eu l’occasion d’approfondir pendant ces quelques jours de débats. La publication aura donc un rôle important, comme à la fois le reflet de ce que nous avons vécu ces derniers jours et, également, un complément nécessaire pour compléter certains points qui, par la force des choses, n’ont pas pu être traités.

Je me permettrai de relever un seul point qui n’a peut-être pas été suffisamment évoqué jusqu’à présent, même s’il était au cœur des esprits de tous : le Tribunal pénal international pour le Rwanda a joué un rôle de pionnier dans cette matière nouvelle qu’est la justice pénale internationale. Il a joué un rôle d’éclaireur dans le développement du droit international pénal. Le Tribunal pénal international pour le Rwanda est le Tribunal des premières fois. Ce qui explique aussi les difficultés qu’il a rencontré. Il est le Tribunal des premières fois parce que, comme nous le savons tous, c’est la première fois que nous avons assisté à une condamnation judiciaire internationale pour crime de génocide. C’est également la première fois, à l’exception de Nuremberg, qu’un chef de gouvernement a été condamné. Et l’on pourrait ainsi continuer à multiplier les exemples.

De façon plus générale, le Tribunal pénal international pour le Rwanda a développé un corpus jurisprudentiel particulièrement riche et important sur des aspects essentiels du droit international pénal. On peut songer notamment aux éléments constitutifs du crime de génocide, mais aussi ceux du crime contre l’humanité et des crimes de guerre ou encore les règles d’engagement de la responsabilité pénale individuelle.

Ce rôle de pionnier qu’a joué le Tribunal pénal international explique sans doute les limites parfois, les lacunes durant ses années d’activités. Ce rôle de pionnier explique les limites mais il ne les justifie pas pour autant. Aucune justice, comme on l’a dit durant les débats, n’est parfaite, parce que la justice est d’abord une justice humaine.

Cela étant dit, lorsqu’il est question de dresser un bilan, il s’agit de reconnaître le rôle de l’humain, le rôle de la politique avec toutes les difficultés et les imperfections que cela peut entraîner, sans toutefois nous départir de l’idéal de justice qui habite toutes les personnes qui se trouvent dans cette salle.

Sur ces propos introductifs, je passe la parole à mon confrère Jean-Marc Sorel, qui va entamer une première synthèse des deux premières sessions qui nous ont réunis jeudi après-midi et vendredi matin.