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contribution 14 - DEGNI-SÉGUI René

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Bilan du TPIR - Poursuites contre le FPR

René DEGNI-SÉGUI

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Merci, Monsieur le Professeur. Je voudrais avant tout emboîter le pas à tous ceux qui m’ont précédé pour remercier les organisateurs, et tout particulièrement le professeur Guichaoua qui a bien voulu m’inviter.

Monsieur le Président, je l’ai dit, cher Collègue, je croyais avoir une double casquette, celle de professeur et celle d’ancien rapporteur spécial. L’on m’a ôté l’une de ces casquettes, alors je vais me contenter de parler en tant qu’ancien rapporteur spécial. Je n’ai pas protesté parce que tout avait été dit et si bien dit que je n’ai pas osé revenir là-dessus.

Cela dit, en tant qu’ancien rapporteur, souffrez que je revienne un peu en arrière pour examiner le parcours de ce Tribunal.

D’abord, je voudrais simplement commencer par souligner qu’il n’a pas été facile d’arriver à affirmer qu’il y avait génocide. Que de pressions subies pour que le rapporteur ne puisse pas conclure qu’il y avait génocide. Monsieur Adama Dieng est là, il pourra en témoigner. Finalement, Dieu merci, c’est passé dans le rapport.

Ensuite, dans le premier rapport, j’indiquais qu’il fallait éviter de procéder à des arrangements politiciens et aller à une sorte de réconciliation, comme on a l’habitude de le faire en Afrique, et qu’il fallait nécessairement qu’il y ait une juridiction, soit par extension de celle de l’ex-Yougoslavie, soit une autre juridiction. Cela a été admis parce qu’il y avait un précédent, il y avait le Tribunal de l’ex-Yougoslavie, et on a admis de créer ce Tribunal.

Ce Tribunal a effectivement été créé. Il a fonctionné, il a – je le constate – travaillé avec les moyens de bord parce qu’au départ, il se posait des problèmes de fonctionnement, mais il a pu fonctionner.

Je crois que ce colloque nous permet de voir toute l’évolution qui a été faite. Nous avons d’abord implicitement consacré judiciairement le génocide ; nous l’avons ensuite fait solennellement par nos propos d’hier ; puis, il y a eu des condamnations. Nous avons assez insisté pour que je puisse m’attarder là-dessus. Je crois que le chemin qui a été parcouru est important, il faut le constater et afficher une sorte d’optimisme par rapport à ce qui a été réalisé.
Ceux qui ont commis le génocide ont été poursuivis, ont été condamnés, dont un Premier Ministre, nous l’avons dit hier, et tout cela est important. Mais – il y a un petit mais – il existe le problème de cette justice de deux poids deux mesures qui reste encore en travers de la gorge. Mon cher ami et collègue Bill Schabas a essayé de faire une comparaison avec Nuremberg, mais le contexte était-il le même ? Les circonstances étaient-elles les mêmes ? N’y a-t-il pas de spécificité au regard de la réconciliation, au regard de ce qu’il existe en Afrique pour dire que cela suffit ? Je pense que nous devrions y réfléchir.

Nous avons insisté, hier, sur Nuremberg, sur cette politique des vainqueurs, sur cette justice des vainqueurs. Il est vrai, comme l’a dit Madame la Ministre, que ce n’est pas à la juridiction d’aller faire la réconciliation sur place, mais il faut que la juridiction établisse les conditions idoines afin que la réconciliation s’opère.

Je ne voudrais pas être long, c’est tout ce que je voulais dire. Merci, Monsieur le Président.

Vincent CHETAIL

Merci beaucoup. Je passe donc, et je vous demanderais d’être aussi bref que possible, la parole à Monsieur Biju-Duval.