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contribution 13 - NSENGIMANA Nkiko

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L’avion - Poursuites contre le FPR

Nkiko NSENGIMANA

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Merci beaucoup. J’ai eu la chance d’avoir fait partie des premières conférences sur le Rwanda en août 94 à La Haye, après le rapport de Monsieur Degni-Ségui sur la création du Tribunal international sur le Rwanda.

Mais j’aimerais d’abord, avant de poser des questions précises aux Procureurs — au pluriel, au féminin et au masculin — préciser que la création du Tribunal à Arusha n’était pas due à l’état de délabrement des institutions à Kigali. C’était d’abord, c’est vrai, parce qu’il y avait une recherche de neutralité et d’une certaine impartialité. Ça, c’est une première chose.

Deuxièmement, je me rappelle, à cette époque, quand les premières idées et les premières décisions sont tombées, n’oubliez pas que le gouvernement de Kigali était opposé à la création du Tribunal pénal international pour le Rwanda. Ça, on l’oublie. C’est bien plus tard qu’il y a eu un accord et que le Rwanda était d’accord pour reconnaître le Tribunal.

Cela dit, j’aimerais revenir sur la question de la stratégie et de l’indépendance du Procureur. Sur trois aspects précis, j’aimerais quand même pouvoir avoir la réponse par rapport à leur stratégie et à leur indépendance.

Vous vous rappelez le rapport Degni-Ségui sur la base duquel le Tribunal international sur le Rwanda a été créé. Il relevait trois crimes : le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre en violation des Conventions de Genève. Il proposait que le Tribunal ait compétence sur ces trois crimes. Après, les statuts du Tribunal ont effectivement accepté de mettre les trois crimes comme relevant de la compétence du Tribunal.

Ma première question est la suivante : j’aimerais savoir pourquoi et comment le Procureur, quand je dis « le Procureur », c’est tous, donc c’est l’institution, n’a choisi de poursuivre que le seul crime de génocide ?

Deuxièmement, dans le même rapport, Degni-Ségui affirmait que des éléments de l’ancien régime et du Front patriotique rwandais avaient commis, justement, des crimes contre l’humanité.
Ma deuxième question est en conséquence : j’aimerais savoir pourquoi et comment le Procureur a décidé de n’enquêter que sur le seul crime de l’ancien régime et d’amnistier d’office, de ne pas chercher à enquêter sur les crimes supposés du FPR, comme c’était dans le rapport Degni-Ségui ?

Troisièmement, dans une stratégie d’enquêtes, on peut choisir d’enquêter sur certains faits jugés importants et en abandonner d’autres. J’aimerais savoir pourquoi et comment le Procureur a décidé de ne pas enquêter sur l’acte de piraterie aérienne qui a emporté la vie du Président Habyarimana et son homologue, alors que ce fait est déclencheur du génocide et qu’il constituait une violation de l’accord de paix et du cessez-le-feu conclus 8 mois plus tôt, c’est-à-dire au mois d’août 1993 ?

Enfin, j’aimerais savoir, parce que ce sont quand même des choix et pas une question de manque de moyens pour toutes les questions que j’ai posées, pourquoi le Procureur, qui savait bien, qui devait savoir, qu’une partie des criminels supposés, présumés étaient aux commandes d’un État, le Rwanda, comment et pourquoi a-t-il choisi d’établir son bureau d’enquêtes à Kigali ?

Voilà, Monsieur le Président, les questions précises pour lesquelles j’aimerais que les Procureurs puissent nous répondre. Merci.

J.P. GETTI

Bien. Quel est le Procureur qui prend la parole ? Mme Del Ponte ?