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contribution 11 - ARBIA Silvana

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Politique & Justice

Silvana ARBIA

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Merci beaucoup. Brièvement, quelques notes sur deux ou trois points.

La question de la politique et de la justice dépasse mon expérience. Je n’ai jamais voulu aborder ce thème, qui se situe un peu entre la philosophie et d’autres disciplines sur lesquelles je n’ai pas de connaissance. Mais, en effet, quelqu’un a évoqué l’évolution que l’on peut constater entre le premier jugement du TPIR et un jugement plus récent, entre Akayesu et Bagosora. Voilà, c’est donc la vérité qui ressort de plus en plus.

Bien sûr, faire des enquêtes ou juger tous les événements, y compris les différentes parties dans le conflit, aide à élargir ces cadres de vérité et à comprendre effectivement ce qui s’est passé au Rwanda en 1994. Cela sert, bien sûr, toutes les parties à l’avenir.

Cet exemple de cette évolution dans le rétablissement de la vérité est positive et il ne faut pas la limiter. La politique ne doit pas limiter ce rétablissement des faits, ne doit pas limiter la construction de la vérité, parce que, je parle je le répète sur la base de mon expérience, la victime ou le survivant veut qu’une vérité des faits soit rétablie par des juges.

La politique avait son rôle à jouer quand le Tribunal a été créé. Bien sûr, c’est une action politique, mais après, concernant le fonctionnement, je verrais très mal une interférence ou quelque chose qui limite l’indépendance soit du Procureur, soit des Juges.

La CPI, elle aussi, pourrait être un exemple où on peut voir la politique agir ou interférer ou rentrer dans les mécanismes de fonctionnement de la Cour. Même si le Statut a été conçu dans une autre optique, moins politique peut-être que l’institution du Tribunal pour le Rwanda et pour l’ex-Yougoslavie, il reste vrai que les mécanismes peuvent impliquer des choix politiques.

Il y a les mécanismes du Conseil de sécurité, bien sûr, mais au moment où le Procureur doit choisir et voir quelles sont les affaires sur lesquelles il doit mener des enquêtes ou des procès, s’il y a des interférences politiques, il n’y a plus de raison d’être une Cour, il faut bien le dire. Il faut que cette indépendance soit effective.

Les États peuvent saisir et dessaisir la Cour, c’est vrai, mais ce serait inacceptable si ces mécanismes étaient utilisés à des fins politiques. En tout cas, lorsque la Cour émet des décisions, ces décisions doivent être mises à exécution. Un mandat d’arrêt, par exemple, est une décision de trois juges à la CPI. Là, j’ai vraiment beaucoup de mal à accepter l’idée que la politique doive jouer un rôle, même le plus noble, pour dire : si on met à exécution cette décision, il y aura, demain, des massacres incontrôlables et autres.

Il faut donc préserver l’intégrité de l’institution judiciaire à travers le respect des décisions de ses juges.

Vincent CHETAIL

Merci. Je crois que nous sommes tous d’accord ici pour reconnaître la nécessité de préserver certaines indépendances, quoique je ne pense pas que l’indépendance judiciaire soit véritablement l’enjeu remis en cause aujourd’hui. C’est encore une fois, à mon avis, le contexte plus global.

Je donne la parole, pour essayer d’aborder un autre aspect qui a été évoqué tout à l’heure et qui est celui de la réconciliation nationale, à Madame Françoise Ngendahayo.